Faut-il rééquilibrer le rapport de force entre les actionnaires et les autres partenaires de l'entreprise ?
Que faut-il penser des initiatives visant à "rééquilibrer" la gouvernance d'entreprise ?
L'approche est naturellement différente de celle des codes de bonne gouvernance produits par les associations patronales (comme celui de l'AFEP/MEDEF) ou les recommandations émises par les associations représentant les administrateurs (comme celles de l'IFA, Institut Français des Administrateurs). Alors que trop souvent les codes traitent essentiellement du conseil d'administration, le code de l'AFG comporte de nombreuses recommandations sur l'Assemblée générale.
Cette année, deux recommandations importantes sur le conseil sont émises :
- en cas de non dissociation de la fonction de Président et de Directeur Général, la société doit fournir aux actionnaires des explications sur les raisons de ce choix (conformément à la règle à présent en vigueur dans la réglementation française du "comply or explain"), mais en outre, il est recommandé que soit désigné un "lead director" qui doit être libre d'intérêt et dont l'un des rôles sera de veiller à la bonne gestion des conflits d'intérêt. Cette fonction de lead director qui est de plus en plus évoquée dans les milieux des conseils d'administration français est très pratiquée dans les conseils anglo-saxons (96% des boards du S&P 500 auraient un lead ou un presiding director en 2008) et a été institutionnalisée par les anglais. En Grande Bretagne, cet administrateur qui a pour titre "senior independant director" est désigné comme le recours des actionnaires au cas où ils ne parviendraient pas à se faire entendre par les dirigeants de l'entreprise (il est prévu qu'il puisse avoir des contacts réguliers avec les actionnaires). Il préside les réunions des non-executives directors (hors de la présence des administrateurs exécutifs) et en particulier la séance consacrée à l'évaluation des dirigeants (voir le Combined Code de Juin 2008).
- en matière de non cumul des mandats, l'AFG demande à ce que la présidence d'un comité d'audit soit considérée comme un mandat supplémentaire (qui compterait donc double). En effet, avec l'Ordonnance du 8 décembre 2008 qui rend la création d'un comité d'audit obligatoire et lui attribue des fonctions très précises (non limitatives et très lourdes), la fonction de Président dudit comité prend une ampleur considérable (voir par exemple le rapport de l'IFA sur les comités d'audit et les auditeurs externes). Comme l'IFA, l'AFG recommande qu'un dirigeant d'entreprise ne puisse avoir plus de deux mandats d'administrateur et que les plafonds légaux ou de bonne pratiques s'étendent aux entreprises étrangères.
Si ces deux mesures étaient suivies d'effet, il en résulterait certainement des modifications majeures dans la pratique du gouvernement d'entreprise. Si on peut être optimiste pour la seconde recommandation (l'AFG pourra pénaliser les entreprises récalcitrantes par des consignes de vote données à ses adhérents de s'opposer à l'élection d'un administrateur qui dépasserait le plafond du cumul), on est plus sceptique pour la première (comment imposer à une entreprise d'élire un lead director ?).
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