Les attestations d’équité valent-elles
le papier sur lequel elles sont imprimées ?

Aux Etats-Unis, beaucoup pensent que les fairness opinions ne valent pas le papier sur lequel elles sont imprimées. 

C’est le cas de Marc Wolinsky, un associé de Wachtell, Lipton, Rosen & Katz, qui a déclaré le 22 octobre 2007 devant la court of chancery de l’Etat du Delaware :

A fairness opinion — you know, it’s the Lucy sitting in the box: ‘Fairness Opinions, 5 cents.’

faisant référence au personnage de bande dessiné de Charlie Brown. Lucy est fréquemment représentée dans un stand vendant de la limonade pour 5 cents et, quelque fois, proposant des conseils pour le même prix …

Malheureusement, rien n’est fait par les professionnels dans la pratique pour corriger cette image désastreuse. Aux Etats-Unis, un public plus attentif (et souvent plus éduqué financièrement qu’en France) ne manque pas de relever publiquement les incohérences. C’est ainsi que Steven Davidoff, professeur de droit à la Wayne State University Law School tient une rubrique intitulée the Deal Professor dans Deal Book, un site du New York Times où il prend régulièrement la plume sur ces sujets. Le professeur Davidoff est, en effet, un grand spécialiste de la question. Il a notamment écrit une étude particulièrement fouillée sur la pratique américaine.

La dernière fairness opinion à se faire épingler est celle rendue par Allen & Company à l’occasion de l’acquisition d’Activision par Vivendi Univeral. Davidoff souligne les incohérences entre l’approche suivie pour évaluer Activision et celle utilisée pour Blizzard Entertainment, principal actif de Vivendi Games.

The Activision opinion gets at a broader problem with fairness opinions and valuation generally. There are no guidelines or standards for valuation, and the banks often do not disclose enough information in proxy statements to make any meaningful comparison or assessment.

Ces critiques donnent toute leur valeur aux principes adoptés en France à l’occasion du nouveau règlement général de l’AMF : non seulement les attestateurs d’équité doivent publier de manière détaillée leurs analyses, mais ils sont censés également appliquer quelques principes clés, notamment celui de cohérence (voir l'article que Dominique Schmidt et moi avons écrit sur ce sujet).

Si cette situation était exploitée par des Davidoff français eux mêmes relayés par des activistes, considérés par l’AMF puis par des juges plus au fait des questions financières, nul doute que nos pratiques évolueraient très vite…

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